Les Aigles de Rome de Marini entre géopolitique et affaire de famille

Épique, sensuel et sanglant, un nouveau volet de cette grande saga captivante sur l’Empire romain ! Interview exclusive d'Enrico Marini

Par l'équipe Dargaud

Aigles de Rome

Table des matières

Enrico Marini signe un scénario plein de rebondissements, avec des scènes de combats grandioses. Un album entre grande aventure et Histoire : sous le règne de Tiberius, Romains et Chérusques continuent de se livrer une guerre dévastatrice !


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La colère de Rome

An 15 apr. J.-C. Il aura fallu six ans à Rome pour réagir à la terrible défaite de son armée à Teutoburg. L’anéantissement de trois légions par les Germains, un désastre inconcevable, ne pouvait demeurer impuni. 

Le Chérusque Arminius, qui avait trahi ses alliés romains pour fédérer les peuples d’outre-Rhin contre eux, sait que l’heure est grave. Huit légions vont déferler en Germanie, avec à leur tête Germanicus, un génie militaire. Le temps presse pour unir une nouvelle fois les nations germaniques.

Mais Arminius a fort à faire pour convaincre Marses, Chattes et autres Bructères de résister avec lui aux Romains : certains veulent se soumettre, quand d’autres craignent qu’il ne devienne roi de la coalition.

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Arminius aux deux visages

Extrait des Aigles de Rome d'Enrico Marini

Le personnage d’Arminius est au centre de l’intrigue du livre VII des Aigles de Rome. On y perçoit toute la complexité et l’ambivalence de sa personnalité. Capable de tuer de sang-froid pour servir les intérêts de sa lutte contre Rome, volontiers manipulateur et souvent impulsif, il sait également se contrôler quand la situation l’exige et faire preuve de tendresse envers sa femme Thusnelda et Hraban, son jeune otage. 

Extrait des Aigles de Rome d'Enrico Marini

Cette dualité lui vient sans doute de sa jeunesse à Rome, où il fut envoyé par son père comme garantie pour ses alliés romains. Il y rencontre Marcus, l’autre personnage principal de la série, avec qui il se lie d’amitié. C’est autour de ce duo qu’Enrico Marini développe son récit. 

Dès le début, Arminius et Marcus deviennent amis un peu malgré eux et par la suite, développent une grande inimitié, chacun souhaitant la mort de l’autre. Les deux ont des personnalités complexes. Arminius est plus ambitieux et c’est un leader né, plus charismatique que Marcus. Il est devenu son antagoniste. Et pourtant, certains lecteurs le préfèrent.

Enrico Marini

Arminius, quant à lui, bénéficie de l’image positive de celui qui résiste à l’envahisseur.

C’est une sorte de Robin des Bois ou de Mel Gibson dans Braveheart. On connaît ses exploits, mais on sait très peu de choses de lui, toutes tirées de textes romains. Est-ce la réalité ? On peut au minimum le considérer comme un grand officier avec du charisme. Certes, c’est un personnage héroïque, mais je ne voulais pas le montrer comme tel. Je voulais qu’on ait un doute sur sa personne. 

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Une affaire de famille

Plus peut-être que dans les autres albums de la série, la famille est au cœur de la narration du livre VII des Aigles de Rome, avec à la clef, des problèmes et des enjeux liés aux relations familiales. Arminius et son épouse enceinte, Thusnelda, attendent l’arrivée d’un héritier. Le chef chérusque va tenter de convaincre son oncle, potentiel rival, de s’unir contre les Romains. Par ailleurs, le père de Thusnelda veut récupérer sa fille, enlevée par son gendre. 

Extrait des Aigles de Rome d'Enrico Marini

Quant à Marcus, il rêve de revoir son fils, pris en otage par son ancien ami Arminius. Enfin, la femme et les enfants du général romain Germanicus, et notamment son troisième fils, futur empereur, l’ont suivi outre-Rhin avec ses huit légions. 

Enrico Marini superpose ainsi aux questions militaires et géopolitiques des préoccupations plus intimes. 

Tout le monde peut s’identifier à des problèmes familiaux. Ce sont des conflits émotionnels que chaque lecteur peut comprendre. Le récit devient alors beaucoup plus proche. Et puis, s’il n’y a pas le côté émotionnel d’une famille ou d’une amitié, le récit n’est pas très intéressant. C’est le cœur de toute bonne histoire.

Enrico Marini

Personne n’est à l’abri de déconvenues familiales, pas même les grands stratèges. 

Les personnages principaux sont très compétents pour manier l’épée. Les voir subir une défaite sur un champ de bataille plus personnel est d’autant plus touchant. Ce besoin d’être bien en famille, de protéger ses amis, les structure eux aussi. Ces personnages sont tout simplement humains.

Enrico Marini

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L'interview exclu d'Enrico Marini

Avec ce livre VII, les lecteurs sont immergés en territoire germain. Mais contrairement aux Romains, les sources documentaires sont rares. Comment avez-vous procédé ?

Enrico Marini : Les Germains n’ont pas laissé de traces écrites. Les seules sources sont romaines ou un peu grecques. C’est frustrant. Les « reconstituteurs » historiques aident beaucoup pour avoir une idée de leur vie et de leurs coutumes. 

Extrait des Aigles de Rome d'Enrico Marini

Mais la différence entre Chérusques, Bructères et Marses est difficile à cerner. On peut peut-être la trouver dans des détails, comme la coiffure, les tatouages ou des symboles spécifiques sur leurs boucliers par exemple. Je pense qu’ils étaient assez similaires.

Dans l’album, on voit des villages, des intérieurs de maison, des vêtements. Comment vous y prenez-vous pour les représenter ?

Enrico Marini : Les archéologues ont trouvé des objets et des traces d’habitation. Pour le reste, je me suis basé sur les « reconstituteurs » et sur des hypothèses visuelles faites par des experts. Mais de toute façon, je ne suis pas un fanatique de la reconstitution exacte. J’essaye de dessiner des choses crédibles. Je ne vais pas passer une semaine pour trouver le bon vase. D’ailleurs, la réalité ne convient parfois pas, sur un plan esthétique. Imaginons qu’un portrait fiable d’Arminius existe : peut-être que sa tête ou sa coiffure ne me plairait pas. 

Extrait des Aigles de Rome d'Enrico Marini

Même chose pour les armures : je me base sur des armures existantes et je fais quelques aménagements. Je dois aussi simplifier pour que le dessin ait une bonne lisibilité.

 

Dans l’album, vous donnez une place importante aux femmes, notamment dans les prises de décision des chefs. Est-ce avéré ?

Extrait des Aigles de Rome d'Enrico Marini

Enrico Marini : Pour les Romaines, c’est une évidence. Voyez Livie, Agrippine, Messaline. Du côté germain, les avis d’historiens sont partagés mais c’est clair que les femmes étaient importantes. 

J’imagine que la vraie Thusnelda devait avoir du caractère. N’oublions pas que ces aristocrates possédaient des esclaves, et qu’il fallait les commander ! De même pour l’épouse du chef Ingomar, à laquelle je donne une grande place. Je trouvais sympathique que ce prototype du « barbare » écoute encore sa femme.

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En librairie

Découvrez ou redécouvrez la série des Aigles de Rome en librairie : 

 

Bonne lecture

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