Xavier Dorison, fulgurant scénariste
Portrait d’un auteur contemporain aux multiples facettes
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Après un diplôme d'école de commerce et un début de carrière dans la finance, Xavier Dorison décide en 1997 de changer d’horizon.
Emporté par sa passion pour la bande dessinée et son goût de l’écriture, il fait une entrée remarquée dans le neuvième art en signant le scénario du Troisième Testament.
L’univers de la bande dessinée vient de gagner un scénariste de talent.
Depuis ses premiers pas dans le 9e Art, Xavier Dorison s’est imposé comme l’une des principales figures de la bande dessinée contemporaine. Il a bâti une œuvre inspirée autant par le récit de genre que par l’Histoire ou le monde de demain. En octobre 2021, cet auteur qui travaille aussi pour le cinéma et la télévision se lance un nouveau défi : redonner vie à l’un de ses héros de jeunesse, un certain Goldorak.
Back to topPirates, western, fantasy et Cie
Sa bibliographie témoigne de sa curiosité et révèle son aptitude à se frotter à tous les univers. Xavier Dorison excelle dans les différentes facettes du récit de genre, qu’il s’agisse de western teinté de surnaturel, d’histoires de super-héros, de grande aventure, d’épopée de pirates, de récit historique ou de fantastique mêlé de romantisme.
Mais la palette de Dorison ne se résume pas au seul récit de genre, qu’il réussit à magnifier par son inspiration foisonnante.
Xavier est un grand raconteur d’histoire qui sait doser à merveille la part d’action d’un récit et la partie plus psychologique des personnages et des situations.
Ralph Meyer
Et si l’histoire, l’aventure ou le fantastique restent des sources privilégiées, le scénariste sait tourner son regard vers le futur et le récit d’anticipation.
Back to topParaboles et politique
Xavier Dorison aime donner naissance à des univers originaux, mais il sait aussi se glisser dans un cadre façonné par d’autres.
Il l’a prouvé avec La Mangouste, un épisode de la série XIII Mystery, dérivée de la saga de XIII écrite par Jean Van Hamme, son idole de jeunesse. Cependant, les deux scénaristes ne conçoivent leur métier exactement de la même manière.
Avec Jean, nous avions envisagé d’écrire un scénario à quatre mains qui aurait donné une suite à l’une de ses histoires, S.O.S. Bonheur. Mais le projet n’a pas abouti, car nos deux visions du monde étaient trop éloignées », regrette Dorison.
À la différence de son illustre confrère, il ne privilégie pas la dimension romanesque de l’intrigue et les rebondissements.
« Ce qui m’intéresse avant tout, c’est d’écrire des paraboles, de mettre en scène un contexte politique et de donner du sens », explique le scénariste.
Parmi les auteurs qui l’ont inspiré, il cite volontiers Serge Le Tendre (La Quête de l’Oiseau du Temps) « pour sa capacité d’écrire de belles paraboles et des récits d’aventure », Patrick Cothias (Les 7 vies de l’Épervier) « et sa maestria des grands récits historiques », ou encore Chris Claremont (X-Men) dont il loue « le sens du réalisme humain ». Sans oublier un autre Américain, Frank Miller et son Daredevil, qui a, selon lui, « révolutionné le genre avec l’utilisation du texte en voix off ».
Back to topLe western réinventé
Undertaker est aujourd’hui la série emblématique de Xavier Dorison. Dessinée par Ralph Meyer, elle met en scène Jonas Crow, un… croque-mort.
Undertaker, c’est en quelque sorte la tragédie grecque transposée dans l’Ouest américain. « La série utilise le décorum et la mythologie du genre, mais à travers une forme de récit très pure, proche du théâtre et de la tragédie », analyse le scénariste, qui a mis du temps avant d’oser s’attaquer au western.
« Pendant longtemps, j’ai eu peur de m’y confronter, tout comme Ralph Meyer avait peur de se confronter à Jean Giraud, le dessinateur de Blueberry. Le jour où il a eu l’énergie de passer le cap, il est venu me voir en me disant : “Je voudrais que l’on fasse un western dont le héros serait un croque-mort !“ » Xavier Dorison
L’éditeur avait demandé au scénariste de dérouler les intrigues sur une dizaine de cycles. Nous en sommes à trois. Dorison, qui affirme en détenir sept dans ses tiroirs, ne manque donc pas de matière pour les années à venir. Les aficionados de la saga peuvent dormir tranquilles. Ce n’est pas le cas du héros, qui croise sur sa route des types assez peu recommandables…
Back to topUne écriture romantique
Jonas Crow est un misanthrope. Un homme en colère, tiraillé entre cynisme et second degré, tout au long d’aventures qui doivent autant aux frères Coen qu’au jeu vidéo Red Dead Redemption.
Pour autant, Xavier Dorison ne peut se résoudre à brosser un portrait sombre et désespéré de Jonas.
Même s’il apprécie les westerns crépusculaires des années 1960 et 1970, peuplés de figures à la morale ambiguë, il garde en lui un vieux fond d’optimisme.
Son tempérament le pousse vers une écriture qu'il qualifie de “romantique“, qui cherche la lumière dans les situations et les personnages les plus sombres.
Back to topDepuis les années 2000, la majorité des héros de BD et de séries sont des antihéros. L’idéalisme n’est plus à la mode, et ils se révèlent être des salauds. Ce n’est pas forcément le message que j’ai envie de faire passer… » Xavier Dorison
Il n’y a pas que la BD dans la vie
En près de vingt-cinq ans d’un parcours jalonné de succès publics et de reconnaissance critique, Xavier Dorison ne s’est pas contenté d’écrire pour la bande dessinée. En 2006, il a signé le scénario du film Les Brigades du Tigre, en compagnie de son complice Fabien Nury.
Ensemble, ils préparent la suite de Paris Police 1900, une fiction historique diffusée sur Canal + dont la première saison avait été écrite par Fabien Nury. Par ailleurs, les droits de la majorité des séries de Xavier Dorison ont été achetés par des producteurs en vue d’une adaptation.
De son côté, le ministère des Armées a fait appel à lui, en 2020, ainsi qu’à neuf autres auteurs de science-fiction. Leur mission : se livrer à un exercice de prospective au sein d’une « Red Team », en imaginant les crises géopolitiques et les innovations technologiques de demain susceptibles d’impliquer les militaires.
Mais le neuvième art reste son terrain de jeu privilégié. Il mène aujourd’hui de front plusieurs séries, d’Undertaker au Château des animaux, une épopée animalière inspirée par La Ferme des animaux de George Orwell.
En octobre 2021, il réalise son rêve le plus fou : écrire une nouvelle histoire de Goldorak. En compagnie de Denis Bajram, Brice Cossu, Alexis Sentenac et Yoann Guillo, Xavier Dorison va donc succéder à Gō Nagai, qui dessina le premier manga chargé d’accompagner la saga télévisée.
Le petit garçon qui se dépêchait, en cette lointaine année 1978, de rentrer chez lui après l’école pour ne pas louper son dessin animé favori, a encore du mal à y croire...
« Go, Go, Goldorak / Et l’aventure continue ! », chantait le générique de la version française. On serait presque tenté d’écrire : « Do, Do, Dorison / Et l’aventure continue ! »
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