Nos corps alchimiques : de l'intime au cosmique
Après Les Filles de Salem, Thomas Gilbert revient avec un album qui explore la complexité des relations amoureuses et dans lequel il imagine un projet fou permettant de fusionner les corps et les esprits. Interview de l'auteur de Nos corps alchimiques
Camille, Aniss et Sarah se sont follement et douloureusement aimés. Puis Camille les a quittés, et ils se sont séparés. Chacun est parti de son côté.
Des années plus tard – neuf longues années de silence plus tard –, Aniss et Sarah reçoivent une lettre de Camille qui leur fixe un rendez-vous quelque part dans la campagne toscane.
Sur place, Camille leur dévoile le fruit de ses recherches et la raison de leur présence : créer une nouvelle humanité et offrir au monde une nouvelle ère biologique. Camille leur propose de tenter une expérience totalement folle : dépasser leurs propres réalités psychiques et physiques pour se réunir, pour fusionner. Pour trouver l’essence de leurs corps alchimiques.
Avec Nos corps alchimiques, Thomas Gilbert signe un récit extraordinaire, au sens propre du terme ; une histoire originale, déroutante et captivante. L'auteur a répondu à quelques questions :
Comment définiriez-vous Nos corps alchimiques ?
C’est une plongée dans l’intimité des trois personnages principaux, en même temps qu’une exploration de mes interrogations sur mon rapport au monde. J’ai voulu réenchanter le réel et voir comment les personnages pouvaient brouiller les cartes de la société dans laquelle nous vivons.
Quelles ont été vos sources d’inspiration ?
Je souhaitais mettre en scène un triangle amoureux, et l’idée d’une alchimie des corps m’a conduit à m’intéresser à cette pseudo-science qu’est l’alchimie. Je me suis plongé dans des livres traitant de l’alchimie spirituelle, des textes abscons et hermétiques, mais qui font néanmoins écho à certains éléments du quotidien ou à la psychanalyse. J’ai semé de petits indices auxquels les lecteurs ne feront pas forcément attention, mais qui font partie de notre culture commune.
Vous évoquez aussi la complexité des relations humaines ?
Oui, c’est un aspect important de l’histoire. Je me suis demandé s’il pourrait exister une alchimie permettant de résoudre les difficultés nées de nos relations avec les autres... Nos corps alchimiques entre en résonance avec les débats actuels autour du genre et de l’identité...
Ce sont des thèmes que j’ai déjà abordés dans Les Filles de Salem et dans Sauvage ou la sagesse des pierres. J’aime bien l’idée d’une fluidité potentielle qui favoriserait un apaisement, comme s’il était possible de ne pas être assigné à un genre, une culture ou une couleur de peau. Pouvons-nous créer une nouvelle fluidité qui permettrait de mieux accepter le monde et de mieux nous accepter ?
Ce récit est aussi un coup de poing graphique, avec un dessin puissant qui, parfois, frôle l’insoutenable. Un dessin qui raconte les corps, les esprits, les âmes et l’univers, qui colle au plus près des émotions et des sensations. Une révolution.
Bonne lecture !