Érostrate, la quête de la célébrité ne date pas d'hier !
À travers le portrait d’Érostrate, Martin Veyron dresse une fable politique, drôle et grinçante sur la vanité des hommes !
Table des matières
Une immersion dans la Grèce antique. À travers cette histoire vraie d’Érostrate, Martin Veyron dépeint un personnage empreint d’une bêtise spectaculaire.
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Érostrate, l'homme qui voulait devenir célèbre
Nous sommes à Éphèse, principale cité grecque d’Asie Mineure, sur les côtes de l’actuelle Turquie, en 356 avant Jésus-Christ. L’immense et majestueux temple d’Artémis, une des sept merveilles du monde antique, vient d’être dévoré par les flammes. Et un jeune homme se vante partout d’être l’auteur de ce méfait.
Bientôt arrêté, Érostrate – c’est son nom – est interrogé par les sages du conseil. Est-il envoyé par une cité rivale ? Ou représente-t-il l’instrument d’un dieu jaloux ? Comment explique-t-il son geste ? Face à ses accusateurs incrédules, Érostrate assène imperturbablement sa seule vérité : il voulait être célèbre, rien de plus.
Alors, pour le condamner à l’oubli éternel, avant de le brûler sur le bûcher, on rend cette sentence : quiconque prononcera le nom d’Érostrate sera mis à mort. Manifestement, ça n’a pas marché !
Back to topLe désir de célébrité
Le désir de célébrité qui semble caractériser notre époque n’est donc pas nouveau sous le soleil.
Dans l’Antiquité, déjà, il hantait l’âme de personnes prêtes à toutes les idioties pour qu’on se souvienne d’elles : Érostrate en est l’exemple magistral.
En cherchant à donner chair et pensée à ce jeune homme dont on ne sait presque rien et en racontant son procès avec l’humour et le sens du dialogue qu’on lui connaît, c’est toute la Grèce classique que fait revivre Martin Veyron.
Loin de s’en tenir à son seul personnage, c’est en effet à un voyage à travers l’histoire et les mythes qu’il nous invite, dans une gourmande ribambelle de digressions.
Les dieux et déesses, les petits et grands héros, et les aèdes qui les chantent… Ils sont tous là, dans des épisodes souvent méconnus de la mythologie. Et l’on croise aussi tous les grands noms du IVe siècle athénien : Platon, Aristote, la courtisane Phryné et le sculpteur Praxitèle, sans oublier la Pythie à Delphes et le truculent Diogène, qui n’a pas son pareil pour ridiculiser ses contemporains.
Un festival joyeux et érudit, hommage à une époque qui ne cesse d’éclairer la nôtre !
Back to top"C'est vraiment des blagues la mythologie grecque"
Martin Veyron se découvre très tôt le goût de dessiner des bonshommes. Il n’ose pas croire qu’il est envisageable de gagner sa vie avec cette activité. C’est pourtant ce qu’il entreprend. Après des débuts dans l'Écho des Savanes, les récits s’ensuivront au fil des ans, toutes sortes de titres traitant de sujets aussi variés que sociétaux. Et alors que paraît Érostrate, Martin Veyron s’étonne d’être encore content de dessiner des bonshommes à 74 ans.
Quel est votre rapport à l’Antiquité grecque ?
Martin Veyron : La mythologie grecque m’a toujours semblé d’une richesse merveilleuse.
Au fur et à mesure qu’on grandit, qu’on comprend un peu mieux le monde et l’humanité, on se rend compte que tout y est abordé : les passions, les excès, les imperfections…
Avec beaucoup de finesse et de profondeur bien sûr, mais aussi avec un souffle de vie puissant et rafraîchissant.
Ça m’a toujours fait beaucoup rire, par exemple, que les mortels soient tenus à un comportement mesuré, priés d’éviter les excès, alors que tout est permis aux dieux, qui s’en donnent à cœur joie dans leurs querelles et leurs intrigues.
De manière générale, on baigne encore dans ce monde-là : les lois, le vocabulaire, les catégories de pensée nous viennent des Grecs, grâce à l’entremise des Arabes qui les ont redécouverts au Moyen Âge.
Je pense que jusqu’à assez récemment les histoires grecques étaient encore très connues en France. D’ailleurs, les chansons de Brassens en sont pleines, comme les toiles des peintres « pompiers »…
Par ailleurs, esthétiquement, il y a une sorte de perfection dans la statuaire et les vases des époques archaïque et classique, qui continue à nous toucher énormément.
Que savons-nous d’Érostrate ?
Presque rien ! On sait qu’il vécut au IVe siècle avant Jésus-Christ, qu’il mit le feu au temple d’Artémis à Éphèse, qu’il fut condamné à mort, et qu’on interdit à quiconque de prononcer son nom. C’est à peu près tout.
Son histoire fut néanmoins écrite quelques années plus tard par l’historien Théopompe, et c’est ainsi qu’elle nous est parvenue. Le poète Marcel Schwob lui consacra une de ses Vies imaginaires à la fin du XIXe siècle. Puis Sartre en fit le sujet d’une nouvelle et l’écrivain Alain Nadaud celui d’un roman…
Mon Érostrate à moi est un brave type, né dans un milieu plutôt favorisé, éduqué par un éraste, qui aurait pu faire une carrière correcte… Mais qui n’avait qu’une idée en tête : la célébrité.
C’est cette obsession de la célébrité qui est le point de départ de cet album ?
Oui, je voulais écrire sur cette tendance qui est à la fois ancienne et si caractéristique de notre époque où tout le monde veut monter sur la table pour faire le malin. Et plutôt que de parler de Trump ou des réseaux sociaux, je me suis souvenu de cette histoire d’Érostrate, qui tient en deux lignes.
Alors j’ai longtemps cherché la bonne forme, le bon ton. Je ne voulais pas écrire une simple biographie qui aurait de toute façon été entièrement inventée tant sont rares les sources sur le bonhomme.
Je ne voulais pas raconter un procès en huis clos, qui aurait été ennuyeux ni faire une comédie parodique en costumes, à la Deux heures moins le quart avant Jésus-Christ. Et puis je voulais aussi raconter quelques mythes que j’aime tant, que j’avais découverts dans le merveilleux livre de l’anglais Robert Graves (Les Mythes grecs) qui les présente avec tant d’humour.
Je tournais un peu en rond quand je suis tombé, dans la vitrine d’un libraire, sur le livre de Geneviève Hoffmann, Naître et devenir grec dans les cités antiques. Puis, sur La Vie quotidienne en Grèce au siècle de Périclès, de Robert Flacelière, un peu plus ancien mais très riche. Et le livre a pris forme.
Une forme de mille-feuilles, ou de miscellanées, où l’on passe joyeusement d’une histoire à une autre…
Oui ! J’adore les digressions. J’aime les conversations qui rebondissent, qui amènent une anecdote, une réflexion…
Alors j’ai fait pareil, en entremêlant plusieurs trames : le procès d’Érostrate, des histoires mythiques, plutôt peu connues, et puis la société grecque de l’époque, qui est tout de même une concentration hallucinante de grandes figures.
Je n’ai pas eu à tordre l’histoire pour que se rencontrent là Platon, le jeune Aristote et, bien sûr, Diogène, qui est de loin mon personnage préféré. Et j’ai même poussé jusqu’à Alexandre le Grand, qui est né selon la légende le jour où le temple d’Artémis a brûlé.
C’était un vrai plaisir de faire dialoguer ces personnages, de montrer qu’avant d’être des penseurs monumentaux, ils étaient des hommes vivants, drôles et inventifs, parfois de mauvaise foi…
Le style graphique change aussi entre la trame historique du procès et les anecdotes mythologiques…
Cette alternance témoigne du côté foisonnant que j’ai voulu donner au livre. Mais je dois vous dire que plus je vieillis et plus j’aime dessiner.
Alors je travaille plus et je prends mon temps : quatre ans pour dessiner cette histoire !
Je voulais que ce soit « beau comme de l’antique ».
Alors j’ai repris la plume, que j’avais depuis longtemps délaissée pour le pinceau, pour faire des hachures, soigner les décors.
Je n’ai pas cherché une précision documentaire que personne n’attend de moi, mais je voulais que le dessin soit riche, qu’il y ait parfois en même temps un côté péplum et quelque chose de très grouillant, car, d’après les spécialistes, hors de l’Acropole et de ses temples, Athènes à cette époque était un dédale de maisons modestes qui poussaient dans une joyeuse anarchie. Je me suis beaucoup amusé à dessiner tout cela.
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En librairie
Découvrez la mythologie grecque revue et corrigée par Martin Veyron dans Érostrate :
Bonne lecture
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