Le premier roman de George Sand en BD

Après La Princesse de Clèves de Mme de La Fayette, Catel et Claire Bouilhac adaptent le premier roman féministe d’une de nos grandes autrices françaises : George Sand. Elles proposent un travail d’orfèvre sur le texte et une contextualisation avec prologue et épilogue sur la vie de l’écrivaine.

Indiana est un grand roman, d’une modernité intemporelle, qui interroge avec férocité la vie conjugale au XIX^e siècle et la faiblesse des Hommes.

Indiana : premier roman féministe

1830, quelque part dans la Brie. Mal mariée à un vieux colonel irascible, la jeune Indiana, âgée de 19 ans, se morfond dans le manoir conjugal. Sa vie bascule lorsque leur nouveau voisin, Raymon de Ramière, pris à tort pour un voleur par son mari, est recueilli chez elle, légèrement blessé mais choqué.

Plus tard, Indiana retrouve le charmant jeune homme dans un bal, à Paris. Raymon commence alors avec elle un jeu de séduction qu’elle croit sincère. Partagée entre son attrait pour le jeune noble et la peur que son mari ne le tue s’il découvre leur passion naissante, Indiana s’aguerrit aux relations sentimentales en acceptant la cour assidue du Casanova et les déboires qui l’accompagnent.

Indiana : une facette sociale du travail de George Sand

Après Rose Valland : capitaine Beaux-Arts, Adieu Kharkov et La Princesse de Clèves, le duo Claire Bouilhac / Catel se reforme pour mettre en valeur une nouvelle figure féminine, George Sand, à travers un de ses romans, Indiana.

C’est le premier qu’Aurore Dupin écrit seule et sous son pseudonyme masculin. Méconnu aujourd’hui, il a un énorme succès à l’époque, supérieur à Notre-Dame de Paris de Victor Hugo. Il aborde le sujet toujours d’actualité de la place des femmes dans la société.

L’intrigue amoureuse est un vernis pour questionner le mariage, la subordination de la femme à l’homme, et le bâillonnement des désirs féminins. En filigrane, Indiana brosse un portrait de la société française à l’orée de la révolution de 1830.

Rigoureusement documentée, augmentée d’un prologue et d’un épilogue dessinés pour mieux comprendre les intentions de l’écrivaine, la bande dessinée offre une belle porte d’entrée au roman.

L’occasion de découvrir un petit bijou qui montre une facette plus sociale et politique de l’œuvre de George Sand.

Interview de Catel et Claire Bouilhac

Trois questions à Catel

Indiana n’est pas le roman le plus connu de George Sand. Comment est venue l’idée de l’adapter ?

Après La Princesse de Clèves et son autrice Madame de La Fayette, nous voulions continuer avec Claire de parler de femmes qui ont laissé une empreinte indélébile dans notre Histoire.

George Sand faisait partie de notre liste. Ses textes les plus connus, comme La Petite Fadette, viennent immédiatement à l’esprit, mais nous avons préféré son tout premier roman, Indiana, aux résonances autobiographiques. Méconnu aujourd’hui, c’est une sorte de Madame Bovary avant l’heure.

Vous avez visité la maison de George Sand à Nohant. C’était important ?

C’est une méthode que j’applique depuis des années.

On a pu comprendre tout l’esprit de George Sand : quitter Paris pour créer un cocon et écrire à son rythme, la nuit ; recevoir les gens qu’elle appréciait, créer un petit monde artistique dont elle était le centre.

La promenade autour de la maison de George Sand, que j’ai dessinée dans l’épilogue, nous l’avons faite avec Claire.

Qui seront les lecteurs et lectrices d'Indiana selon vous ?

L’album est pensé pour tous les âges. Mais il y a aussi de notre part une démarche pédagogique, vers un public jeune. Les adolescents ont souvent du mal à lire les œuvres qu’on leur impose en cours.

 Comme pour La Princesse de Clèves, nous voulons donner l’envie d’en savoir un peu plus sur le livre. Même si tout le monde connaît l’autrice, lit-on encore beaucoup George Sand aujourd’hui ? On espère que l’album Indiana contribuera à populariser l’œuvre de la dame de Nohant.

Pour approfondir - Découvrez les expositions : La Princesse de Clèves et À l'école des lettres avec George Sand

Trois questions à Claire Bouilhac

Pourquoi avoir choisi d’adapter une œuvre de George Sand ?

Je suis une grande fan de George Sand et je trouve injuste qu’elle ne soit pas suffisamment reconnue pour la verve qu’elle met dans Indiana, par exemple.

Non seulement c’est une femme scandaleuse, qui s’habillait en homme pour pouvoir s’affirmer, mais c’est aussi une écrivaine talentueuse qui a imposé son point de vue féminin.

Avec Catel, nous n’avions pas envie d’adapter un de ses « classiques », qui nous paraissaient trop candides. Nous avons d’ailleurs utilisé une voix off pour conserver le décalage de ton entre les dialogues et la causticité des analyses de Georges Sand.

Qu’est-ce qui vous a attiré dans Indiana ?

C’est un livre très moderne pour l’époque, qui aborde beaucoup de notions autour de la femme, de sa soumission et de son émancipation. Comment les femmes peuvent-elles aborder l’amour ? Comment peuvent-elles se construire une vie ?

Indiana ne met pas le mariage au-dessus de tout et c’est d’ailleurs ce qui a été décrié à l’époque. Le livre a même été interdit dans les pensionnats de jeunes filles, de peur que cette lecture ne donne de « mauvaises idées » aux pensionnaires.

Avez-vous été confrontées à des difficultés pour faire cette adaptation ?

Indiana n’est pas qu’une histoire d’amour. George Sand fait une multitude de digressions sur les rapports hommes/femmes, la politique, les rapports sociaux, avec beaucoup d’humour. Comme l’autrice, nous avons inscrit l’action dans son contexte historique. George Sand parle de son époque, de ses idées, avant tout elle met énormément d’elle-même dans Indiana.

Pour en savoir plus sur le travail des autrices, retrouvez leur interview dans Les Midis de France Culture Catel et Claire Bouilhac mettent en bulles la fougue de George Sand

Un peu de lecture

Découvrez en librairie ou sur 9^ème Store, le roman graphique Indiana de Catel et Claire Bouilhac.

Bonne lecture !