Habemus Bastard, attention polar décapant !
Un récit noir teinté d’humour, où se mêlent drogue, clergé, mafia et vie provinciale ! Dans la sacristie, personne ne vous entendra dealer…
Table des matières
Jacky Schwartzmann, étoile montante du polar français, lauréat du Prix du polar européen pour Shit ! et Sylvain Vallée, dessinateur de Katanga et de Il était une fois en France (Prix de la série à Angoulême), s’associent pour délivrer la bonne parole et partager l’écriture de ce polar aussi original que drôle : Habemus Bastard.
Un très bon polar noir, bien frappé, décapant et iconoclaste
Une cavale au cœur du Haut-Jura, un pur polar dans les codes du genre, entre la série Fargo des frères Coen et les romans de Donald Westlake, mais à la sauce française !
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Nouveau curé. Nouvelles méthodes
Le moins que l’on puisse dire, c’est que le père Lucien n’est pas un prêtre ordinaire. Fraîchement débarqué à Saint-Claude, dans le Jura, il se fait remarquer par ses sermons peu orthodoxes – d’après lui, Dieu serait noir. « Un curé moderne », conclut l’un de ses paroissiens en sortant de la messe qui n’a duré que dix petites minutes.
En réalité, le père Lucien n’est pas curé. Pour lui, la soutane n’est qu’une couverture destinée à lui permettre d’échapper aux types pas très catholiques qui ont décidé de lui faire la peau. « Moi, j’ai fait vœu de cavale », résume-t-il en quelques mots. Au cas où, il cache un flingue sous ses habits ecclésiastiques. On ne sait jamais : en cas de coup dur, la voix des armes est parfois plus efficace que celle de Dieu.
Back to topAuteurs choc pour un polar décapant
Donald Westlake pour l’humour, le Fargo des frères Coen pour l’ambiance : il est pires références.
Originaire du Jura, Jacky Schwartzmann a choisi pour cadre de cette histoire une région qu’il connaît bien, donnant ainsi une vraie crédibilité au récit. La narration au cordeau et les dialogues ciselés sont mis en scène par le découpage efficace et le trait expressif de Sylvain Vallée, qui restitue à merveille l’ambiance hivernale d’une petite ville de province.
Le deuxième tome paraîtra en octobre 2024. D’ici là, le père Lucien aura le temps de convaincre de nouveaux paroissiens et de s’habituer à une petite vie tranquille, entre la messe du dimanche et les séances de confession, qu’il pratique de manière très personnelle. Mais aussi de vérifier si une soutane peut faire office de gilet pare-balles…
Back to topInterview des auteurs
L’écriture décapante de Jacky Schwartzmann, plume reconnue du polar français, nous éclaire sur son travail avec Sylvain Vallée, maître de la mise en scène :
Quelles sont les différences entre l’écriture d’un roman et celle d’un scénario de bande dessinée ?
Jacky Schwartzmann : Je ne suis plus tout seul pour travailler sur une histoire : nous sommes deux, avec le dessinateur, ce qui change tout ! Cela dit, j’avais l’habitude de l’écriture à plusieurs, car j’avais déjà travaillé sur des projets de séries télé qui n’ont pas encore vu le jour.
Ce qui m’a aussi donné très envie de travailler avec Jacky, c’est son écriture originale et décapante, son phrasé percutant, son humour noir et la dimension amorale de ses romans.
Sylvain Vallée
Et les deux modes d’écriture, sous forme de séquences successives, sont assez proches l’un de l’autre. Un roman s’écrit en solitaire, mais j’aime beaucoup collaborer avec un dessinateur ou un co-scénariste.
Quels sont les avantages – ou les inconvénients – de la bande dessinée par rapport au roman ?
Jacky Schwartzmann : Quand j’écris un roman, je n’aime pas décrire les lieux ou l’aspect physique de mes personnages. D’ailleurs, quand je lis un livre, les descriptions m’ennuient… Au moins, dans une bande dessinée, je n’ai pas à me charger de cette corvée, c’est le dessinateur qui s’en occupe !
J’écris toujours un roman à la première personne, et le lecteur est dans la tête du narrateur, qui est aussi le protagoniste. Dans une bande dessinée, il est plus difficile de traduire les pensées du personnage. On peut toujours utiliser une voix off ou des bulles de pensée, mais ça ne peut pas être systématique.
Comment avez-vous organisé votre collaboration ?
Jacky Schwartzmann : J’ai d’abord soumis un synopsis d’une dizaine de pages à Pauline Mermet, notre éditrice. Je l’avais envisagé comme la « bible » d’une série télé. Ensuite, j’ai rédigé un scénario d’une trentaine de pages, avec les dialogues et le découpage de l’histoire, case par case.
Avant de commencer, je pensais que le découpage serait fastidieux, mais j’ai adoré ça ! Nous sommes ensuite passés à la phase d’écriture, qui a pris la forme d’un ping-pong créatif.
Sylvain a effectué un gros travail de mise en scène, il restructurait l’histoire en fonction de sa vision de dessinateur, puis je repassais derrière lui. C’est lui qui a proposé de la découper en deux albums au lieu d’un. Nous avons consacré presque deux ans à l’écriture du scénario des deux tomes.
Pourquoi avez-vous situé cette histoire à Saint-Claude, dans le Jura ?
Jacky Schwartzmann : Je vis à Besançon, pas très loin de Saint-Claude. C’est une ville qui me fait penser à Fargo, le film des frères Coen. Il fait froid, il y a beaucoup de neige, la ville n’est ni belle ni moche…
Elle se prête bien à cette sorte de western urbain. Sylvain a su lui donner une dimension esthétique, avec les gouttes de sang dans la neige qui accrochent le regard. J’aime bien situer mes histoires ailleurs qu’à Marseille ou à Paris ; je trouve que cela donne une dimension « exotique » au scénario.
Qu’est-ce qui vous a séduit dans le scénario de Habemus Bastard ?
Sylvain Vallée : La possibilité de revenir au polar, un genre qui représente la majeure partie de ma production, mais avec un mélange de tons et une couleur différente. J’ai pris goût à la comédie avec Tananarive et j’avais envie de réaliser une sorte de synthèse de ces deux registres.
J’ai aussi été tenté par un récit ayant pour environnement la montagne, la neige, une ville retirée, et par la possibilité de dessiner l’atmosphère d’une église, avec la dimension graphique d’une soutane noire sur fond blanc.
Traiter des questions de la foi, du clergé et du pouvoir qu’il peut exercer, des notions de destin et de moralité m’a aussi beaucoup intéressé. Avec un curé armé et prêt à tout pour sauver sa peau, mais qui n’a d’un curé que la soutane, on s’ouvrait un champ amusant de possibilités…
Et dans la collaboration avec Jacky Schwartzmann ?
Sylvain Vallée : Ce qui m’a plu est l’idée de travailler avec un romancier, après plusieurs collaborations avec des scénaristes de bande dessinée ou de cinéma. C’était une occasion de me renouveler en adaptant une histoire originale, puisque Habemus Bastard, au départ, n’est ni un roman ni un scénario de bande dessinée au sens habituel.
Ces deux albums m’ont permis d’effectuer un travail d’adaptation, en passant des cent planches du scénario original à deux fois quatre-vingts planches, sur le rythme, l’effet page-turner et la mise en scène, tous ces aspects de la narration qui me passionnent.
Ce qui m’a aussi donné très envie de travailler avec Jacky, c’est son écriture originale et décapante, son phrasé percutant, son humour noir et la dimension amorale de ses romans. J’en profite pour le remercier d’avoir bien voulu que je m’approprie son histoire originale pour en faire une bande dessinée et que je co-scénarise ce récit.
Comment définiriez-vous le personnage de Lucien, le « prêtre » ?
Sylvain Vallée : Il ne s’encombre pas de scrupules, ce qui est recommandé pour un homme de main ! Pour lui, c’est une question de survie. Mais sa soutane lui impose des responsabilités auxquelles il va devoir faire face, alors qu’il ne possède pas les codes de sa fonction…
Quelles sont vos influences en matière de polar ?
Sylvain Vallée : Je partage avec Jacky un goût pour les films des frères Coen. Je les ai découverts quand j’avais 15 ans avec Arizona Junior ; ils m’avaient scotché à mon fauteuil ! J’aime aussi beaucoup le romancier américain Donald Westlake et un écrivain islandais, Arnaldur Indriðason. Encore mon goût pour les environnements enneigés et leur ambiance propice aux polars glacials et feutrés… Mais là, c’est sans humour !
En quoi la ville de Saint-Claude se prête-t-elle bien à un roman noir ?
Sylvain Vallée : Avec son atmosphère particulière en hiver et sa situation encaissée, c’est l’endroit idéal pour se faire oublier ou disparaître quand on en a besoin. Lucien vit d’ailleurs un grand moment de déprime quand il descend du train…
Quel a été le rôle de votre éditrice chez Dargaud ?
Sylvain Vallée : Pauline Mermet me suit depuis Katanga. Elle connaît mon goût pour le polar et la comédie, et c’est elle qui m’a proposé de travailler sur une histoire originale de Jacky. C’est aussi grâce à elle que j’ai pu entrer en contact avec Elvire De Cock, qui réalise les couleurs de l’album. Elvire est une grande professionnelle et possède un atout important pour la mise en couleurs : elle sait dessiner.
Pour réaliser une BD de cent soixante planches, quand on a la responsabilité d’une co-scénarisation, de l’adaptation, de la mise en scène graphique, de son dessin et des intentions de mise en couleurs, mieux vaut être bien entouré !
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Une cavale au cœur du Haut-Jura, un pur polar dans les codes du genre. Nouveau curé. Nouvelles méthodes. Bienvenue à Saint-Claude :
Bonne lecture !
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